Les phares d'une voiture, les yeux d'un chat et un arrêt brusque: c'est ainsi que commence Freezer, un roman graphique écrit et dessiné par Veronica "Veci" Carratello, édité par Bao Publishing en 2016 en Italie et qui traite des événements de la famille Robinson. Le chat, Kafka, est le premier protagoniste que nous rencontrons. Il vient d'échapper au risque d'être heurté par la voiture de M. Piastrelli, le voisin odieux. Ce n'est pas un cas isolé, car ce beau chat noir est suicidaire et ne rate jamais une occasion à travers l'histoire d'essayer de mettre fin à ses jours. Ce simple élément devrait nous faire comprendre l'extravagance de la famille Robinson. En fait, nous avons la mère, Anna, plutôt inquiète et convaincue qu'inviter une camarade de classe de sa fille à dîner de sa propre initiative est le meilleur moyen de lui faire trouver de nouveaux amis. Ensuite, il y a Diego, le père, un grand acteur, même s'il ne trouve du travail que dans des publicités embarrassantes pour du papier toilette ou des laxatifs. Et puis il y a l'oncle Ernesto, qui parle d'une manière délicieusement obsolète et ne s'assied pas à cause de sa phobie. Enfin, nous avons la grand-mère, une vieille femme placide qui n'a pas dit un mot depuis le décès de son mari bien-aimé; le petit frère, Elvis, obsédé par les jeux vidéo; Mina, une presque adolescente qui, comme cela arrive souvent à son âge, craint le jugement des autres envers elle-même et ses parents extravagants.

Suite à une invitation à dîner absolument indésirable, Mina se trouve confrontée à une augmentation de la malchance et des circonstances haineuses, ainsi qu'à l'angoisse incessante du changement. Elle se sent sous les projecteurs et dans ce cas elle l'est vraiment, puisque la "lumière de la fête" avec ses 1 000 watts est allumée en raison de la présence des convives invités à dîner, contribuant à l'inconfort de l'enfant. Mina a honte d'avoir à présenter sa famille à Marta, parfaite en apparence, belle et admirée en classe. Elle est hantée par le spectre de devoir grandir, devenir adulte et se conformer aux autres. C'est aussi pourquoi elle s'est engagée dans une lutte avec son corps et l'apparition de ses menstruations. L'angoisse de grandir, de perdre son enfance et d'affronter les mystères de l'adolescence la fait se sentir perdue dans une forêt dantesque, peuplée de tampons flottants et de regards déterminés à l'observer. Heureusement, les mots drôles de son oncle sont sages et la font sourire. Pas étonnant que Mina regarde ses camarades de classe avec appréhension et redoute leur jugement. Le monde lui montre une normalité où grandir le plus tôt possible est un objectif à tenir, les relations sont basées sur l'apparence et les réseaux sociaux, où ce qui vous montrez plus que ce que l'on est vraiment, c'est à dire une réalité dont elle préférerait fuir. Le trait de Freezer est agréablement adapté à l'histoire, les dialogues sont construits en intégrant des textes dans les bulles avec la conception de signes, de publicités ou d'écritures sur les contenants: un mélange capable de rendre la lecture intéressante. La musique est un élément constamment cité, à commencer par les noms des enfants, les noms de famille et les chemises des personnages et plus encore. Dans l'angoisse grandissante, entre problèmes domestiques et économiques, voisins déplaisants et complication des événements, cette famille pourra-t-elle se blottir autour de ses valeurs et faire face aux changements qui les affectent ?