Scénario et dessin : Pierre-Yves Gabrion
Karma City est une ville où il fait bon vivre. L'intérêt général y prime toujours sur l'intérêt particulier, au nom des lois universelles du karma. Mais la société "parfaite" a des limites, et Karma City va connaître une vague de mouvements sans précédent. Tout commence par l'arrivée d'Emma List, une jeune femme chercheuse en paléontologie qui vient d'être acceptée dans la ville malgré un karma un peu négatif. Quelques instants plus tard, Emma est victime d'un AVC et sa voiture s'écrase violemment. Le bureau des enquêtes va entrer en piste, mené par Asuki, un policier un peu nerveux et Napoli, son patron ingérable. L'agent principal Kate Cooper devra démêler le vrai du faux. Et si les recherches d'Emma étaient la cause de son "accident" ? L'archéologue avait en effet trouvé des traces évoquant l'existence de sociétés pré-karmiques. Quand un suicide vient semer le trouble dans Karma City, la série noire semble continuer, surtout que la police locale est impliquée. Le banal accident de la route d'Emma List cache en réalité l'existence d'un trafic de fausses montres karma défectueuses qui provoquent une "épidémie d'AVC" soudaine à travers toute la ville et ses environs. Emma List avait mis à jour un trafic d'antiquités karmiques, à la frontière des territoires fédérées du sud. Sauf que l'affaire est désormais traitée en justice par la juge Bénédicte et qu'elle prend la défense des coupables ... avant de périr d'un AVC (décidément). Tout semble converger vers les plus hautes sphères de la société, où une mystérieuse opération "citadelle" vient d'être déclenchée.
Karma City prend place dans une ville littéralement coupée en deux, avec la zone blanche ultra sécurisée, et une zone grise moins surveillée. Le yin et le yang dans toute sa splendeur. Et comme toute utopie, Karma City admet rapidement ses limites à plusieurs niveaux, notamment pour ce qui concerne le libre-arbitre des hommes. L'équipe d'enquêteurs est vraiment très mal assortie et laisse présager des situations cocasses. Karma City joue sur des registres classiques, mais l'ouvrage s'avère très bien dessiné, évoluant dans un petit univers de grande ville côtière avec des personnages à l'allure ravagée. Le trait réaliste clair s'en sort à merveille. La trame monte crescendo, on amasse peu à peu les pièces d'un gigantesque complot qui pourrait emporter le monde tel qu'il existe à Karma City. Seul un ordinateur à plasma quantique doté d'une intelligence artificielle cognitive multitâche pourrait arrêter les fausses montres en circulation, sauf qu'il a décidé de dormir pour l'instant.
VERDICT
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Karma City est un polar d'anticipation qui nous plonge dans un univers parallèle où le karma domine la société. Le libre arbitre est érigé en valeur primordiale, alors que la ville est littéralement coupée en deux. Cela change des policiers habituels, surtout que la brigade est très mal assortie. Les dessins de Gabrion sont magnifiques et les personnages très bien exploités, de quoi livrer une réflexion intéressante sur l'avenir de l'homme dans son ensemble.