2013. La cour d'appel de Londres vient de rejeter une plainte qui accusait Lionel Barrington, président d'une société d'armement, d'être responsable de la mort d'un enfant de sept ans, victime d'une mine antipersonnelle dite intelligente, fabriquée par la société que dirige Sir Barrington. Alors qu'il célébrait ce succès, Barrington était loin d'imaginer que son propre jardin était truffé de ces mines et qu'elles vont provoquer un nouveau drame. Les responsables de cet attentat est une organisation criminelle exclusivement féminine, symbolisée par l'idéogramme Shi (La Mort en japonais). Le récit fait alors un brutal retour là où tout a commencé, en mai 1851, date de la première exposition universelle. L'Empire britannique entend profiter de cet événement pour prouver sa supériorité industrielle, militaire et économique. Une jeune fille de bonne famille décide de s'intéresser au sort d'une japonaise dont le bébé est mort et qui a été enfermée dans un asile. Elle est loin de se douter que son acte va avoir de graves répercussions sur l'avenir ...

La façon dont les enfants sont maltraités dans les usines britanniques au milieu du XIXe siècle est affligeante. Ils subissent des brimades de très longues journées. Ils travaillent dans des conditions dangereuses et gagnent peu d'argent. La question est qui se soucie d'eux ? Pas la classe noble en tout cas. Ils pensent que tout va bien. La reine britannique non plus. Heureusement, il existe le mouvement clandestin de résistance Angry Mothers. Nous avons fait la connaissance des leaders de ce groupe, Jay et Kita, durant le premier cycle de Shi. Jay est toujours à la recherche de sa fille et la japonaise Kita veut aussi se venger après la mort de son enfant. Leur dépliant d'adhésion gratuit a sensibilisé tout le monde au sort subi par des millions d'enfants en Grande-Bretagne. Leur marque, laissée sur les fesses des esclavagistes, est rapidement devenue légendaire. Kita est l'active du duo. Kay est plus raisonnée. Malgré leurs discussions mutuelles, elles forment un duo solide et il reste une attirance érotique entre elles. Le titre "Black Friday" fait référence à un vendredi sanglant à Trafalgar Square où 241 personnes ont été tuées lorsque l'armée britannique a mis fin à un soulèvement des Angry Mothers de manière très sanglante. Zidrou mêle magistralement leurs expériences à celles de leurs épigones, qui pratiquent encore aujourd'hui le principe d'œil pour œil d'une manière plutôt manière peu orthodoxe et se venger ainsi de l'establishment qui leur a fait du tort. Les auteurs voyagent dans le temps et l'espace de manière très cinématographique : de la famille décadente et pas si noble de Jennifer à la cour de la reine Victoria (dont certaines filles sont secrètement fans des rebelles) à la fille de Jen qui, des années après la mort de sa mère, trouve ses derniers mots écrits dans les marges d'un livre de Charles Dickens. Il y a cinq ans, la pochette du premier album avait suffi à nous convaincre de lire cet album. Cela prouve d'une part l'importance d'une couverture frappante et d'autre part cela montre également à quel point Homs est un artiste spectaculaire. Il dépeint surtout le sanglant 'Black Friday' de manière très expressive. Un miroir en tôle avec de nombreux caissons soudés aux formes les plus diverses. Cela a l'air très cinématographique et en tant que lecteur, vous vous sentez impliqué dans toute l'horreur. Tension, luttes de classe, tour de passe-passe japonais, arrière-plan historique… Shi a tout pour plaire. C'est beaucoup. Peut-être même un peu trop. Même s'il faut avouer que ce méli-mélo de thèmes est très bien géré. Certaines connaissances préalables sont utiles avant de commencer cet album noir de jais, mais vous pouvez également plonger dans cette histoire sans cela. C'est bien vu par le scénariste belge Zidrou. De cette façon, vous pourrez également attirer un nouveau lectorat pour ce deuxième cycle qui sera composé de deux albums.