Une femme récemment divorcée, Yoshimi (Hitomi Kuroki) et sa petite fille Ikuko (Rio Kanno) emménagent dans un nouvel appartement et découvrent que tout le quartier semble dangereusement gorgé d'eau. Une petite tache d'humidité sur le plafond de leur chambre grandit à une vitesse alarmante, il pleut constamment et le cartable rouge vif d'un enfant ne cesse d'apparaître sur le toit, peu importe le nombre de fois qu'il est jeté dans une poubelle. Quelqu'un semble courir dans l'appartement du dessus, bien que personne ne semble y vivre depuis que la femme qui l'occupait auparavant s'est enfuie, laissant sa jeune fille Mitsuko seule - jusqu'à ce qu'elle disparaisse elle aussi mystérieusement...

Après Ringu (1998) et sa deuxième suite, Ringu 2 (1999), Hideo Nakata a réalisé le superbe thriller Kaosu (1999) avant de revenir explorer certains des territoires précédemment tracés dans ses adaptations de Koji Suzuki avec Dark Water (Honogurai Mizu no soko kara), basé sur un autre roman de Suzuki, thématiquement lié aux histoires de Ringu mais qui n'en est pas une suite directe. Il y a certainement des similitudes très claires entre Dark Water et Ringu, bien qu'en fin de compte ces similitudes soient largement superficielles - les deux films mettent en scène des fantômes de jeunes filles, une tombe aquatique et une mère et son enfant qui sont la cible d'une présence obsédante. Il s'agit d'un film plus ambitieux et plus mature que Ring, un film qui tirera sur votre corde sensible tout en vous effrayant. Les manifestations surnaturelles sont, du moins au début, plus subtiles que dans les films de Ring, des choses brièvement aperçues qui ne devraient pas être là au coin du cadre ou qui se cachent derrière des personnages qui ne se doutent de rien. La première moitié est consacrée à un sentiment croissant d'effroi et de désespoir, alors que Yoshimi s'efforce d'accepter son destin de plus en plus sombre, tenant à peine le coup face à une adversité considérable, pour le bien de sa jeune fille vulnérable. Pendant longtemps, nous ne sommes pas tout à fait sûrs qu'il se passe quoi que ce soit de surnaturel - tout cela pourrait n'être que la manifestation de l'effondrement progressif de la santé mentale de Yoshimi.

Mais comme il s'agit d'un film de fantômes japonais, il ne fait aucun doute, dans la seconde moitié, que Mitsuko est réellement traquée par l'esprit d'un autre enfant perturbé dont le terrible destin est peut-être sur le point de se répéter. Le rythme lent de la première moitié fait place à de véritables frayeurs lorsque Yoshimi en vient à croire que la jeune fille morte - la négligée Mitsuko, décédée après s'être noyée dans un grand réservoir d'eau sur le toit de l'immeuble - essaie de remplacer Ikuko. La vérité est tout autre, car la jeune fille a des projets très différents pour la famille en difficulté et ce n'est pas nécessairement Ikuko qu'elle recherche. En plus d'être souvent effrayant, Dark Water est également très touchant, comme peu de films d'horreur le sont. La plupart peuvent vous faire sursauter, certains peuvent vous dégoûter. Dark Water a le pouvoir de vous laisser émotionnellement brisé - le film est traversé par une vague de mélancolie et l'épilogue, en particulier, est d'une tristesse déchirante. La relation mère-fille est magnifiquement dessinée, c'est l'étude la plus convaincante de l'amour d'une mère pour son enfant que le genre ait jamais vue. Yoshimi lutte non seulement contre le surnaturel dans ses efforts pour offrir une vie meilleure à sa fille, mais aussi contre un ex-mari indifférent et contre un sentiment paralysant d'isolement et de solitude qui rend d'autant plus émouvante sa décision cruciale et déchirante dans l'ascenseur. Yoshimi est une figure tragique piégée dans un monde bien plus terrifiant que n'importe quelle manifestation surnaturelle et c'est cette situation difficile qui rend le film d'autant plus efficace.  Nakata a continué à travailler dans l'horreur et a réalisé quelques films intéressants - Kaidan (2007), L : Change the World (2008) - avant de s'installer en Occident où, inévitablement, tout ce qui le rendait intéressant a été proprement gommé, ses talents gaspillés dans des films de piètre qualité comme l'américain The Ring Two (2005) et le britannique Chatroom (2010). Rien de ce qu'il a fait n'a atteint les sommets de Dark Water, qui reste son exercice le plus abouti en matière d'effroi surnaturel. Même toutes ces années plus tard, le moment final, profondément émouvant, entre Yoshimi et Ikuko reste gravé dans la mémoire, un dernier plan à la fois terriblement triste et plein d'espoir. Un remake américain a suivi en 2005, réalisé par Walter Salles et interprété par Jennifer Connelly dans le rôle principal. Il y a un air de fatalité écrasante lorsque l'on est forcé de constater qu'il n'est tout simplement pas à la hauteur de l'original...