Réalisé par Jean-Marie Poiré.
Lydie (Josiane Balasko), une grosse moche que son chef de service/amant abandonne d'emblée pour une mieux fichue, est obligée de chercher une colocataire pour payer le loyer qu'elle avait endossé dans la perspective de son prochain hyménée. C'est une ravissante idiote, Éva, qui est un peu n'importe quoi, mannequin, modèle, fille légère qui s'installe et qui attire toute la bande de jeunes viveurs très friqués qu'elle a l'habitude de fréquenter. Faune cosmopolite qui passe son temps entre Saint-Tropez, Marbella, Los Angeles, les Bains-douches, etc. S'ajoute au hourvari Gérard, le frère de Lydie (Luis Rego), employé de poissonnerie dont les yeux s'allument comme des comètes dès qu'il aperçoit ces beautiful people à la vie facile et aux mœurs légères. Et, pour couronner le tout le brave, mais très violent Jean-Yves (Daniel Auteuil), follement amoureux d'Éva qu'il voudrait emmener dans un tour du monde austère sur son petit bateau, fait irruption périodiquement pour tout casser…
Est-ce que l'on imagine, dans cet début de 21ème siècle qu'il serait possible de tourner un film doté d'un titre pareil, sans se faire traiter d'un de ces nouveaux mots incantatoires qui ont pour effet de vous dénier droit à la parole ; tout ces mots en -phobe qui vous disqualifient. Grossophobie, voilà qui vous serait jeté à la tête et qui brûlerait votre front d'une marque indélébile ; d'autant que les grosses filles mises en scène (en premier lieu au premier plan Lydie), mais aussi la première colocataire qui se présente à elle (Chantal Neuwirth) sont non seulement grosses mais moches et ridicules. Et qu'elles sont mises en parallèle avec tout un bataillon de filles toutes plus ravissantes – ou spectaculaires – les unes que les autres, mais également, il faut le dire, tout aussi idiotes, superficielles et insignifiantes. On se demande d'ailleurs si on ne jetterait pas à la tête de la ravissante vedette, Éva, qui s'appelle Ariane Lartéguy, l'abomination du nom de son père, Jean Lartéguy, militariste auteur de bouquins à succès, dont Les Centurions qui furent portés à l'écran par Mark Robson, avec Anthony Quinn et Alain Delon. Grossophobie, donc, à quoi on pourrait aussi ajouter misogynie. La chose est aussi à observer : l'idée du film émane de Josiane Balasko ; on ne va évidemment pas le lui reprocher mais on serait bien étonné si, en 2025, alors qu'elle est désormais de tous les combats anarcho-libertaires qui traînent et quelle signe à peu près toutes les pétitions qui se présentent sous sa plume en faveur du Camp du Bien elle repiquerait au truc. Il faut ajouter qu'elle s'est adjoint les services de Catherine Lara, pour composer la musique, dame qui doit bien avoir à peu près le même comportement vertueux et pétitionnaire. Donc, en suivant les excellentes péripéties du film, on ne pourrait plus tourner ça aujourd'hui. C'est très vif, très bien emmené. Ça ne vole pas haut, les quiproquos sont faciles, mais ils font mouch., La description de la petite société fêtarde est moins féroce que celle qu'en fait Gérard Lauzier (Je vais craquer, La tête dans le sac) mais elle gratouille. Et il y a même l'intervention en guest star de l'excellent Thierry Lhermitte qui interprète un végétarien non violent et qui, refusant viande et poisson (qui ne sont que du cadavre) acceptant de manger des œufs et se voit rétorquer par Gérard/Régo : Et" pourtant un œuf, c'est un poussin pas encore né qui est déjà mort !". La tyrannie végane n'avait pas encore frappé. La fin est aussi improbable que tout le reste ; la grosse Lydie et l'intrépide navigateur Jean-Yves partent ensemble, amoureux (ou résignés). On songe à ce qu'un des maîtres de la comédie italienne aurait fait du sujet.
VERDICT
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Les hommes préfèrent les grosses est un film d'un autre temps, mais il s'avère drôle et bien plus intelligent qu'on le suggère de prime abord. C'est toujours amusant de regarder l'autre côté du rideau, même en 2025.