Réalisé par Christian Petzold.
Le jeune écrivain Léon (Thomas Schubert) part quelques jours d'été à la mer Baltique avec Félix (Langston Uibel), un ami d'enfance. Il veut travailler sur le manuscrit presque terminé de son deuxième roman dans la maison qui appartient à la mère de Félix. Félix a également accepté de travailler avec lui : il souhaite créer un dossier de candidature pour étudier l'art. Mais Léon doit à contrecœur partager une chambre avec Félix, car Nadja (Paula Beer), qui travaille comme vendeuse de glaces dans la station de vacances voisine, habite dans l'autre pièce. Léon n'arrive pas à dormir la nuit car Nadja écoute de la musique forte et s'amuse avec son partenaire sexuel. Léon préfère dormir dehors, sous la tonnelle, où il s'assoit également pendant la journée. Sans aucune envie, il se rend à la plage avec Félix, où il reconnaît Devid (Enno Trebs), l'homme de la chambre de Nadja, à son poste de sauveteur. Lors du dîner commun devant la maison, Leon réagit avec agacement à Devid, jusqu'à ce que Felix le remette à sa place, indigné. Devid et Felix découvrent l'amour l'un pour l'autre. Nadja est toujours aimable avec Léon et souhaite faire plus ample connaissance avec lui, ce qui lui plaît tout à fait. Mais il ne peut pas se laisser aller, car il est là pour travailler ! Tendu, Leon accueille l'éditeur Helmut (Matthias Brandt), qui a fait le déplacement pour discuter de son manuscrit. Mais Helmut semble s'entendre mieux avec les autres qu'avec lui.
Après son film romantique « Undine » de 2020, le réalisateur Christian Petzold se consacre à nouveau aux thèmes romantiques. Dans « Rotter Himmel », l’atmosphère n’est pas chargée de mythologie, mais plutôt caractérisée par des journées d’été chatoyantes et lumineuses au bord de la mer. Dans une maison de vacances située dans la forêt côtière, quatre jeunes peuvent balancer leurs jambes, flirter et explorer au gré du moment. Mais l'écrivain Léon, du point de vue duquel l'histoire est racontée, s'isole. Il estime qu'il n'a pas de temps à consacrer aux rencontres insouciantes. Les incendies de forêt font rage au loin, créant un sentiment diffus d’incertitude. Les joies de l’été sont-elles bientôt terminées à l’heure du changement climatique ? Le film, qui parle aussi de l'art d'écrire, a reçu le Grand Prix du Jury à la Berlinale 2023. Pendant un certain temps, l'intrigue ne semble pas vraiment démarrer. Dans la torpeur de l'été, il y a tout le temps d'écouter le bourdonnement des insectes ou de bavarder avec les autres. Le personnage principal, Léon, semble antipathique parce que tout l'agace et qu'il prend ses distances. Mais en même temps, on ressent son étonnement et sa vexation lorsqu'il voit Felix, Devid et Nadja - dont l'intérêt ouvert le flatte secrètement - rire ensemble. La malchance qu'il ressent, alors que son éditeur préfère lui aussi se tourner vers les autres, est drôle et toute la situation semble bien compréhensible, tirée de la vie. La tension naît vraiment de cette lenteur sans but. Comme si l'on était assis à la table, on perçoit les tensions et la dynamique. L'attention des participants va et vient spontanément, mais Léon ne peut pas le gérer. Tous les personnages semblent authentiques dans leur diversité et sont remarquablement interprétés. Si, dans "Undine", Petzold mettait le couple d'amoureux en relation avec un mythe vieux de plusieurs siècles, il fait ici réciter à Nadja le poème "Der Asra" de Heinrich Heine. Il s'agit à nouveau du lien entre l'amour et la mort, mais au niveau du présent, il s'agit aussi d'une déclaration que Léon pourrait appliquer à lui-même avec profit. Puis la tragédie fait brusquement irruption de l'extérieur dans ce lieu de retraite, sans pour autant capter encore durablement l'atmosphère cinématographique. L'œuvre de Petzold reste un film d'été mélancolique et léger. Non seulement Leon, mais aussi le public, reçoivent des pistes de réflexion sur l'essence de l'amour, la force libératrice et la fragilité des belles journées d'été.
VERDICT
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Le film d'été de Christian Petzold n'est ni austère ni chargé de mythologie. Alors que trois jeunes gens profitent de l'ambiance insouciante dans une petite maison au bord de la mer Baltique, le quatrième ne parvient pas à entamer un dialogue sans tension avec eux. Des sentiments romantiques renforcent son conflit intérieur alors que les incendies de forêt se rapprochent. Un poème de Heinrich Heine confère une profondeur poétique à ce film remarquablement interprété et empli d'une légèreté paresseuse.