Cambodge, 1978. Trois journalistes français sont invités par les Khmers rouges pour réaliser un entretien exclusif avec le chef du régime, Pol Pot. Le pays leur est présenté comme un paradis. Mais au-delà du village Potemkine, le régime khmer rouge est en déclin et le Vietnam menace d’envahir les frontières. Le régime cherche des boucs émissaires et mène secrètement un génocide à grande échelle. Sous les yeux des journalistes, la belle image se fissure, révélant l'horreur. Leur voyage se transforme peu à peu en cauchemar.
Entre 1975 et 1979, le Cambodge a été rebaptisé Kampuchéa Démocratique, lorsque le pays s'est retrouvé sous l'égide du tyran Pol Pot et de son armée de partisans fanatiques connus sous le nom de Khmers rouges. Le dictateur a exsangué le pays économiquement et environ deux millions de personnes, opposants au régime, ont été brutalement tuées, victimes d'un véritable génocide perpétré contre ceux qui ne sont pas d'accord. Dans ce long métrage, trois courageux Français acceptent l'invitation du régime et se rendent au Cambodge, dans l'espoir de pouvoir documenter quelque chose d'intéressant et rêvant de pouvoir interviewer Pol Pot. On y retrouve une journaliste experte dans cette zone géographique, un photojournaliste courageux et un sympathisant des théories révolutionnaires de la fin des années 70. La réalité que les trois pourront percevoir est celle d'un pays qui a cessé d'espérer une véritable révolution démocratique inspirée par les valeurs de liberté et d'individualisme, opprimé par un contrôle constant et votant pour interdire toute initiative motivée par un plus ce qui légitime une forme d’initiative privée, considérée comme inévitable et essentielle dans une perspective géographique totalement différente et lointaine. Rithy Panh revient documenter les horreurs perpétrées par le régime dictatorial sanguinaire de Pol Pot, mais il choisit cette fois d'alterner la magnifique vision scénique de ses marionnettes et les minutieuses reconstitutions stylisées d'arrière-plans, de paysages et de situations historiques réelles, déjà appréciées dans le documentaire L'Image manquante (2013), avec une narration plus traditionnelle, impliquant, entre autres, deux stars françaises de renom telles que Grégoire Colin et Irène Jacob. Deux acteurs très appréciés des auteurs, devenus dans leur jeunesse les acteurs fétiches de réalisateurs tels que Claire Denis et Krzysztof Kieslowski respectivement, et ce n'est pas un hasard.
VERDICT
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Si le film n'enthousiasme et ne déconcerte pas autant que le dérangeant L'Image manquante, et se retrouve parfois embarqué dans des situations rendues moins percutantes par une rhétorique trop galopante, l'acte de dénonciation est à nouveau sacro-saint et puissant, nécessaire pour entretenir la mémoire d'individus dangereux capables de s'ériger en leaders fantômes pour perpétrer des massacres et des persécutions dont l'histoire humaine de la planète est remplie, mais que la postérité tend trop facilement à oublier.