La Venin, c'est une femme ayant commis des crimes de sang froid, donc certains violents, portant atteinte à des dignitaires américains. On comprend vite que, sous son apparence sulfureuse, se cachent des blessures qui remontent à l'enfance, que cette violence qu'elle sème sur son passage n'est pas gratuite. Fière combattante des injustices, elle est pourtant recherchée activement par la célèbre agence Pinkerton. Cette jeune femme veut faire la lumière sur son passé, que l'on comprend exceptionnellement douloureux. Elle veut comprendre pourquoi sa mère l'a livrée, jeune adolescente, à des hommes qui voulaient la sacrifier pour un rite. Elle veut retrouver son géniteur, comprendre ses motivations, son parcours. Et pourtant, elle ne peut se départir de sa haine envers ces deux êtres. Cette quête de soi sera encore sanglante, douloureuse. Toutes les pièces du puzzle se mettent en place. Il reste un homme à abattre : le président des Etats-Unis. Tout y est : explications, retournements de situations et quelques surprises pour le destin de certains personnages. Fin de voyage pour Emily dans ce Western qui a évolué du genre Spaghetti dans ses premiers albums pour prendre des air beaucoup plus John Fordien dans ces derniers épisodes. Une fin vraiment très réussi avec un Laurent Astier qui ce sera avéré un très grand dessinateur de ce genre avec un soucis du détail qui ne ferait pas honte à Jean Giraud. Et puis Emily, ce personnage singulier qui restera gravé dans ma mémoire. Une série qui mériterait définitivement une belle intégrale avec plein de croquis.

Graphiquement, les dessins d'Astier éclairent l'histoire, dans le bon sens. Il opte surtout pour la clarté. Il alterne un style quelque peu caricatural, très accessible, avec des inventions astucieuses. Par exemple, les flashbacks ont une structure de page quelque peu inhabituelle, avec des coins art déco arrondis et leur propre coloration rétro. Les images des villages sont également excellentes, tout comme l'attention particulière qu'il accorde aux puissantes expressions faciales. Astier termine les albums avec les 'journaux d'Emily', où l'on peut tout de suite lire d'où il tire sa moutarde. Une petite remarque ici est que la police pourrait peut-être être un peu plus sombre, afin que le texte soit plus facile à lire. En tout cas, on s'est régalé dès la première page. De beaux titres western apparaissent ces jours-ci, mais celui-ci se situe quelque part au sommet.