Scénario : Aurélien Ducoudray
Dessin : Fred Druart
Yuan est un routier chinois, il transporte du charbon qu'il charge dans des mines clandestines à ciel ouvert. Puis il avale les kilomètres pour livrer son charbon en espérant à chaque fois tirer le meilleur prix de sa cargaison. Yuan travaille avec Wei, son « fixer », qui marchande les prix avec les acheteurs potentiels. Mais un jour, Wei décide de supprimer Yuan pour lui voler son camion... Yuan n'a donc qu'un seul objectif : récupérer son camion... coûte que coûte !
Cette suie qui marque. Tout ce qu’elle touche. Transportée par le vent. Sur les habits, les jouets des enfants, les facades des maisons, les mouchoirs dans les poches. Et puis sur la gueule. Sur les mains. Elle passe sous les vêtements et couvre le torse. Entre dans la bouche et encombre les poumons. S’immisce dans la vie. La recouvre de noir. La tue. Il y a les images des mineurs, ceux qui exploitent les mines autorisées. Ceux qui ont disparus de nos contrés depuis bien longtemps mais dont les gueules noires restent immortalisées par les romans, les luttes sociales, les générations de toux grasses. Et puis il y ce qui se dit moins. Ceux qui exploitent pour survivre encore. A l’abri d’aucun regards mais ignorés de tous. Dans des mines clandestines, loins de nos fauteuils. Qui doivent espérer quelques roches qui tombent des camions, pour les ramasser, les transporter, les revendre. Nourrir nos putains de centrales et allumer nos lampes. C’est tout une économie parallèle. Chacun son rôle. Je grapille, tu transportes, il ramasse les miettes, ils achètent, dealent. Aurélien Ducoudray nous transporte en Chine, dans la vie d’un de ces exploités. Qui n’a d’autre rêve que de pouvoir mieux négocier cette crasse noire qu’il convoie. Il se sent deja pas si mal car il possède un camion. Alors il part sur la route. Charge et décharge, négocie, se méfie… jamais assez. Car dans la jungle de la démerde c’est chacun pour soi. Alors il sera dépouillé et laissé pour mort. Les dessins lunaires de Fred Druart nous plongent dans ces paysages dévastés, sans autre vie a y espérer. C’est beau dans l’espoir qui reste malgré tout, dans l’aliénation consentie. Alors on pense a Sisyphe. A l’absurde. A ceux qui sont ignorés. Ces anonymes sans avenir qui nous chauffent aussi. 80% des émissions de C02 depuis 2016 sont émis par 57 gros industriels. Pour quelle misère répandue en plus a coté ?
VERDICT
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« Les âmes noires » est un polar social, presque documentaire des excès connus mais refoulés de nos besoins d’énergies. C’est prenant et glacant… Sublime.